Le manuel « Construire bas carbone » est un véritable guide à l’attention des décideurs du bâtiment. La réponse d’une construction bas carbone ou d’une rénovation bas carbone devient indispensable face à l’enjeu du changement climatique. Et désormais réglementaire à la prochaine réglementation environnementale RE 2020. Nous vous proposons de passer en revue ce manuel pratique qui en moins de 50 pages fournit les informations essentielles pour une construction bas carbone.
Pourquoi un tel manuel ?

Aujourd’hui, construire bas carbone devient une nécessité face au défi climatique. Cela devient même l’avenir de la construction.
Pourquoi s’engager ? Comment mener un projet bas carbone ? Quels sont les changements ? Qui doit s’impliquer ? Donner des clefs aux décideurs, qu’ils soient propriétaires fonciers, aménageurs publics et privés, collectivités, foncières, investisseurs et utilisateurs, directions immobilières, directions RSE…., tel est le but du Manuel de la construction bas carbone, ouvrage pédagogique et collaboratif réalisé avec les experts, membres actifs de l’Association pour le développement du bâtiment bas carbone (BBCA), pionnière du secteur.
Les premières décisions d'un projet de bâtiment bas carbone
S'engager de la programmation
Les caractéristiques du terrain, les directives en matière d’urbanisme, tout comme la forme architecturale, le système constructif, les matériaux. Ou encore les quantités utilisées, l’organisation du chantier, sont déterminants. Cela influent directement ou indirectement sur l’empreinte carbone d’une opération de construction.
Il devient donc nécessaire de la part de tous les acteurs, collectivités, maîtres d’ouvrage , architectes, constructeurs, bureaux d’études et entreprises de s’engager à construire bas carbone.
À noter qu’en cas d’appel d’offres l’affichage de l’ambition bas carbone est indispensable pour être intégrée par tous les acteurs.
Mesurer pour piloter et progresser
Lorsque l’on prend en compte l’empreinte carbone d’un bâtiment, il devient nécessaire de mener une analyse de son cycle de vie ;
La méthode consiste à mesurer les émissions sur tout le cycle de vie de l’ouvrage. Construction exploitation, fin de vie, sur une durée fixée conventionnellement aujourd’hui à 50 ans.
Cette méthode permet :
- d’évaluer les émissions carbone aux différents stades du projet,
- d’identifier des clés d’arbitrage et des correctifs,
- de capitaliser pour reproduire un projet ou progresser dans la mise en œuvre des futures opérations.
Il est important que cette méthode évolue à mesure que la connaissance se développe pour être au plus près de la réalité des émissions du bâtiment.
Rénover, construire neuf, que choisir ?
Cette question doit impérativement être étudiée avant le projet afin de conserver au maximum l’existant . Selon l’ADEME, la construction d’un bâtiment de logements collectifs consomme environ 80 fois plus de ressources que la rénovation de son équivalent.
Si cette étude évalue des consommations de matières elle est aussi un indicateur très pertinent quant à l’impact carbone.
Les problématiques de l’artificialisation des sols, des émissions de gaz à effet de serre, tout comme les problèmes de pression sur les ressources, par exemple le sable massivement employé dans la construction neuve et dont les réserves s’épuisent, plaide en faveur de la rénovation et de la limitation de la construction neuve au strict nécessaire.
Quels changement pour les acteurs du bâtiment ?
Adapter ses pratiques tout en innovant
La démarche bas carbone engage la profession dans un processus d’innovation en continu. Elle requiert une collaboration élargie et beaucoup plus d’interactions et de concertation entre les différents acteurs (collectivités, maîtres d’ouvrage, maîtres d’oeuvre, industriels, négoces, entreprises et exploitants). De plus, elle nécessite des connaissances spécifiques, une montée en compétences, avec une préparation en amont et un travail d’ingénierie plus poussé.
Les projets en réalisation sont-ils favorisés ?
Il y a, par définition, plus de coordination en conception/réalisation bas carbone, ce qui n’exclut pas de mener des projets de ce type avec des méthodes plus classiques. De même, les variantes sont possibles, il faut toutefois faire attention aux propositions qui pourraient impacter le bilan carbone.
Le point commun, c’est la sensibilisation de tous les acteurs de la chaîne et d’un engagement sur les enjeux, à chaque étape du projet. Il est recommandé de se faire accompagner par un assistant à la maîtrise d’ouvrage (AMO) bas carbone pour en assurer la coordination.
Pour les collectivités et services d’urbanisme :
L’objectif de construction bas carbone doit être intégré dans la feuille de route, dans le but de lever les freins et d’encourager le développement des bâtiments bas carbone.
- Former les élus et acteurs du territoire.
- Définir une stratégie territoriale bas carbone au sein de documents de planification.
- Mettre en oeuvre une stratégie bâtiment bas carbone dans les documents Sraddet, Scot, PLU…
Pour les aménageurs
L’aménageur doit apprendre à identifier les leviers bas carbone de son territoire. Pour cela, il a la possibilité de réaliser un diagnostic carbone dudit territoire afin d’analyser le poids de chaque émetteur (mobilité, consommation énergétique, construction de bâtiment, travaux publics, etc.) et ainsi connaître les leviers sur lesquels agir. Ce travail doit être réalisé en nouant des partenariats avec les collectivités, de façon à animer une gouvernance bas carbone du territoire. Concernant les espaces publics, l’aménageur devra être attentif à ce que son équipe de maîtrise d’oeuvre urbaine intègre une compétence « carbone », s’inscrivant ainsi dans la dynamique de la RE 2020 et de la démarche BBCA quartier. Il aura aussi à coeur de fixer des directives (fiches de lots) en cohérence avec la dimension « bas carbone ».
Pour les programmistes
Lors des phases de concours/mise en concurrence, il est important de pointer dès le début les ambitions environnementales d’un projet bas carbone. Et de procéder aux arbitrages nécessaires. Le tout en évitant la surenchère des contraintes sous peine de rendre le projet irréalisable (ex. imposer un réseau de chaleur peu vertueux, imposer tous les labels, etc.).
- Accompagner la maîtrise d’ouvrage (MOA) dans le choix et l’optimisation du terrain à bâtir. Afin d’adapter, voire même de repenser, le programme en fonction de la configuration ou des caractéristiques de la parcelle.
- Apporter un conseil dans la sélection de l’équipe de maîtrise d’oeuvre (MOE) lauréate, en adaptant les critères de notation. Références carbone, formation, coût, critères de sélection en fonction du projet et des objectifs.
- Dans les cas de bâtiment existant, étudier les possibilités pour le réutiliser plutôt que de le démolir, en revoir les surfaces, prévoir leur partage, le nombre d’usagers…
Pour les maîtres d’ouvrage (MOA), promoteurs, bailleurs et autres investisseurs
- Prévoir un allongement de la durée de la phase de conception. Les projets bas carbone demandent beaucoup plus de réflexion et une plus grande préparation en amont qu’un projet classique.
- Recourir à des compétences dédiées et formées au bas carbone. Architectes sensibilisés et expérimentés, assistant à maîtrise d’ouvrage (AMO) et bureau d’études (BET).
Pour les maîtres d’oeuvre (MOE)
- Développer de nouvelles compétences. Méthodes (analyse de cycle de vie), outils (logiciels dédiés) et données (FDES, configurateurs bois, acier, biosourcés)
- Réaliser un diagnostic ressources afin de réutiliser des matériaux ou matériels lors d’une démolition.
- S’assurer que les caractéristiques thermiques et techniques sont en accord avec l’empreinte carbone (en effet, un matériau peut être très bon thermiquement, mais catastrophique au niveau de son empreinte carbone).
- Interagir davantage avec l’économiste, et ce de la conception à la réalisation, en mettant à jour les données de façon régulière. Toute variante doit être regardée à l’aulne de l’approche bas carbone.
- Innover avec plus de matière grise, au profit d’une économie de matières premières et de la durabilité de l’ouvrage.
- Disposer impérativement des outils de conception dès la phase esquisse. En effet, il est difficile d’estimer le poids carbone d’un projet à partir de ratios.
Pour les fabricants industriels
- Innover pour réduire l’empreinte carbone des produits et équipements, avec des procédés de fabrication plus optimisés.
- Effectuer les tests nécessaires à la mise au point des justificatifs requis (Avis technique, certificat Acermi, marquage NF, etc.)
- Rédiger les FDES pour les produits et s’assurer de leur validité par des mises à jour régulières.
Pour les distributeurs et négoces
Élargir l’offre pour permettre aux artisans et aux entreprises de s’approvisionner dans une large gamme de produits et systèmes, notamment biosourcés, géosourcés et locaux.
Pour les entreprises
- Innover et réhabiliter des savoir-faire avec des produits alternatifs dont l’empreinte carbone est faible (bois, biosourcés, béton et aluminium bas carbone, etc.)
- Accompagner les MOE dans les innovations en réalisant des essais de chantier, des Appréciations techniques d’expérimentation (Atex), bien avant la phase travaux…
- Chiffrer et suivre avec précision les quantités de matériaux mises en oeuvre. Se former aux chantiers bas carbone. Gestion des approvisionnements en privilégiant le local ; réduction des déchets. Mais aussi des consommations d’eau, d’énergie, de carburant ; respect du planning d’intervention de chaque entreprise…
Pour les exploitants
- Entretenir les installations.
- Indiquer les dysfonctionnements rencontrés pour y remédier de manière collégiale. Par exemple : en cas de problème avec le système énergie renouvelable, ne pas se contenter de pousser les puissances des chaudières.
- Revoir les puissances de raccordement qui sont souvent surdimensionnées.
- Sensibiliser les utilisateurs, afin qu’ils aient conscience d’être dans un bâtiment bas carbone.
- Communiquer sur les consommations en kWh mais aussi en CO2, et les piloter dans une vision de sobriété d’exploitation.
Pour les utilisateurs
- Réduire leurs consommations en énergie et en eau.
- Partager les usages : stationnements, locaux…
- Favoriser le réemploi dans le cas d’un réaménagement.
- Sensibiliser une nouvelle fois les usagers, afin qu’ils aient conscience d’être dans un bâtiment bas carbone.
Pour les assureurs
Faire évoluer les dispositifs d’assurance et leurs conditions économiques pour encourager la réutilisation de matériaux issus de la démolition, la construction avec des matériaux en cours de validation réglementaire.